lundi 20 décembre 2010

Augusten Burroughs is my Hero - Courir avec des Ciseaux

Deux lectures en l'espace de moins de six mois. Je n'avais pas été aussi enthousiaste à propos d'un auteur depuis longtemps.

Ma découverte de Courir avec des Ciseaux et d'Augusten Burroughs a été le fruit d'un total hasard. En lisant un jour la biographie de Ryan Murphy, qui avait réussi à me fasciner avec Nip/Tuck, je me suis aperçue qu'il avait réalisé un film, jamais sorti en salles en France. Pourtant, avec un casting de rêve et une production signée Brad Pitt et Jennifer Anniston, cet ovni avait tout pour être un vrai succès. Son visionnage m'a totalement fascinée et j'ai alors eu besoin d'en savoir plus.

J'ai donc appris ainsi l'existence d'Augusten et ai immédiatement commencé à dévorer l'intégralité de son œuvre à un rythme très soutenu. Courir avec des Ciseaux n'allait être que le premier de la liste et aussi certainement le plus choquant.



Augusten Burroughs nous y conte essentiellement son adolescence chaotique dans les années 70 avec un talent teinté d'une sensibilité et d'un humour incomparable. Entouré d'un père absent et alcoolique qui semble ne lui accorder aucune attention (leur seule activité commune se résumant à emmener leurs ordures ménagères à la déchetterie) et une mère poète complètement narcissique qui ne s'intéresse à lui que par intermittence, parce qu'il lui renvoie une image d'elle-même flatteuse, le jeune Augusten a du mal à trouver sa place. Evidemment, ses parents ont des relations extrêmement conflictuelles et violentes. Sa mère souffre également de graves troubles mentaux et est régulièrement sujette à de terribles crises psychotiques.

Pour survivre, Augusten développe petit à petit une personnalité hors du commun et se rattache au peu de choses qu'il réussit à contrôler dans ce quotidien morne et malheureux (sa coiffure et l'éclat de ses bijoux, par exemple). De toute façon, il n'a alors aucun ami (il écrira en avoir eu deux par le passé, mais sa mère ayant "énervé" leurs mères respectives, celles-ci ont interdit à leurs rejetons de le fréquenter).

Si vous pensez que cette histoire n'est, somme toute, rien que de très banal, peut-être changerez vous d'avis en apprenant qu'à l'âge de 13 ans, la mère d'Augusten confie son fils de manière quasi-définitive aux bons soins de son psychiatre, un médecin farfelu qui ressemble au Père Noël, et l'abandonne littéralement dans la maison pour le moins spéciale de ce dernier. Il y vit avec sa famille recomposée et quelques patients qu'il héberge ponctuellement (ou, pour certains, de manière presque permanente).

Ce qui horrifie d'abord notre héros et nous par la même occasion, c'est l'aspect crasseux de la demeure en ruines qui jure dans le quartier, plutôt coutumier des maisons cossues et rutilantes. Lui qui aime l'ordre et la propreté est obligé, par la force des choses, de s'acclimater à un environnement complètement bordélique où disputes, tensions, mais aussi une immense liberté règnent. Cette liberté, il la chérira autant qu'elle lui pèsera, puisque comme il l'écrira, il aurait aimé que quelqu'un lui dise parfois ce qu'il ne faut pas faire. Il lui arrive donc de s'emprisonner lui-même. Mais le docteur considère que chacun, dès l'âge de 13 ans, est suffisamment mûr pour prendre ses propres décisions et Augusten apprécie de se sentir écouté pour la première fois de sa vie et de constater que l'on s'adresse à lui comme à un adulte.

Les scènes surréalistes et d'une violence psychologique souvent inouïe se succèdent et on peine à croire en 2010 que les évènements aient pu se produire tels que Burroughs les décrit. Et pourtant. Dans cette famille tellement instable et bancale, Augusten finit par s'affirmer et savoir ce qu'il veut faire de sa vie. A l'âge où une personnalité se construit généralement, celle d'Augusten se déconstruit sous nos yeux, avant que progressivement, celui-ci finisse par trouver sa voie.

Avec une lucidité et un recul incroyable sur la bizzarerie du monde qui l'entoure, l'auteur nous témoigne pourtant la tendresse qu'il ressent pour chacune des personnes de sa nouvelle famille. Mais cela ne l'empêche pas d'envier le manque d'attaches sentimentales de son frère biologique, atteint du syndrome d'Asperger.

Au fil du temps, Augusten sera sans cesse tiraillé entre deux sentiments : celui d'avoir simplement envie d'une vie normale, et celui d'être parfaitement dans son élément au sein la famille Finch.

Souvent poignantes, ses mémoires, qui portent pourtant le nom de "roman", nous emmènent sur des montagnes russes d'émotions fortes, qui nous font en permanence nous remettre nous même en question, et nous amènent à changer notre vision du monde. Avec ses mots, il a la faculté de nous montrer le meilleur des gens, nous apprend à ne juger personne sur les apparences (après tout, il s'est lui-même toujours senti différent et parlait aux branches des arbres lorsqu'il était petit). Courir avec des Ciseaux délivre avant tout un formidable message de tolérance et lorsqu'on referme le livre, on se sent changé. On a grandi, en même temps que son auteur.

dimanche 12 décembre 2010

Oh La La! à la Flèche d'Or - 3 décembre 2010

Quasiment un an et demi jour pour jour après notre dernier live du groupe de Natacha Le Jeune, nous étions fébriles à l'idée de le retrouver sur scène pour préparer la sortie de son premier album, le 24 janvier prochain. Si la salle était déserte à notre arrivée, nous eûmes tout juste le temps d'avaler une bière ou deux avant qu'une petite foule de connaisseurs arrive à la Flèche d'or et que le concert commence.

Toujours plutôt froids en arrivant sur scène, Natacha et ses deux compères ne nous adressèrent pas de bonjour. Oui, c'est là la première nouveauté : le groupe ne compte plus que trois membres, comme différents articles parus dans la presse jusqu'alors avaient pu le laisser supposer. Mais ce n'est pas tout. En lieux et places des bassistes et clavier, on retrouve... Natacha, un peu paumée, qui fait le boulot de trois personnes à la fois, pas toujours de manière très convaincante.



Pourtant, les chansons, sexy et entraînantes, étaient bien là. Natacha n'entama pas son set par le single Relax, qui tourne depuis quelques mois sur Ouï FM (l'ancienne Radio Rock cuktivée et cultivante devenue la propriété d'Arthur, monsieur Virgin Radio) mais par Goodbye Superman. Autant dire que nous les connaissions par coeur, après plus d'un an et demi passés à les écouter.

Textes provocateurs, sexuels, ambigus, le groupe fait moins dans la dentelle qu'AS Dragon, qui pourtant se posait déjà là. Natacha en rajoute même en brandissant son poing sur Un poing c'est toi (écrite par Philippe Katerine), alors que le caractère explicite de cette chanson est déjà assez évident. Si l'on redécouvre avec plaisir Rendez-vous avec un salaud, que nous n'avions plus entendue depuis longtemps, les deux nouveautés chantées en anglais s'avèrent être les titres les plus faibles du concert.



On attend un show, celui d'une bête de scène qui sait d'ordinaire transmettre son énergie rageuse et tendue. Mais malheureusement, le concert ne décollera jamais vraiment. Natacha a l'air crispée de retrouver un public parisien aux réactions quasi-inexistantes. Clément Fionio (également membre de Paco Volume, avec Antoine Boistelle, le batteur) prend quant à lui de plus en plus d'espace au sein de la formation, aussi bien sur scène qu'au chant et Natacha semble lui laisser de la place sans regrets. Si elle commence un peu à se lâcher vers la fin sur Paris ne t'aime pas, qui est incontestablement le meilleur titre du futur album, c'est un peu tard, et l'ensemble nous laisse tout de même beaucoup sur notre faim. Nous n'imaginions pas tant de froideur.




Pour sa défense, le groupe est neuf et a sans doute encore besoin  de se roder et de comprendre ce qui lui réussit. Natacha Le Jeune étant responsable de certaines de mes émotions les plus fortes en concert, j'attendrai de voir la suite (et d'écouter l'album) avant de tracer une croix sur Oh La La!



Après le set, toute stressée et timide, j'ai pris mon courage à deux mains et me suis approchée de la chanteuse alors qu'elle était au bar en train de discuter. Nous avions déjà échangé quelques messages sur Facebook et je mourrais d'envie de lui proposer une interview. Elle m'a demandé ce que j'avais pensé du spectacle. J'ai répondu que j'avais trouvé ça bien, mais qu'elle m'avait semblé tendue, surtout au début. Tout de suite, elle a semblé vexée car comme j'avais pu le lire ici ou là, ce qu'elle souhaite avant tout, c'est bien se démarquer de son ancien groupe et de l'image qu'elle avait pu y donner. Pour en savoir plus, je lui ai alors proposé de faire une interview pour le blog. Très gentille, elle m'a immédiatement écrit son adresse e-mail sur un flyer qui traînait et après l'avoir saluée, je suis repartie fière de moi et pleine d'espoir.

mardi 30 novembre 2010

Condensé de concerts en boîte

Si je devais écrire un billet pour chaque concert auquel je vais, j'y passerai sans doute la semaine. Heureusement, pour faire plus court, je peux me contenter de poster des photos, et de dire quelques mots sur chacun.

La semaine dernière, donc, mercredi 17 novembre, j'ai eu la chance et la surprise d'assister au set incroyable d'I Love Ufo sur la scène du Glaz'art. Concert intense, tourneboulant, du genre qui vous happe dès la première note et ne vous relâche que plus d'une heure après, assoiffé et en sueur. On ne sait plus vraiment où on est, ni où on habite, et on a complètement oublié qui on était. Mais c'était vraiment bon et chargé en émotions, et c'est tout ce qui compte.



Quelques jours plus tard à peine, j'ai été traîner mes baskets du côté de Boulogne Billancourt et c'est assez rare pour le souligner. Dans le cadre du festival BBMix, j'y ai découvert une charmante salle à l'acoustique plus qu'enthousiasmante : le Carré Bellefeuille. Dans l'ordre, j'ai pu y admirer samedi soir les jeunes musiciens de The Berniz, très prometteurs et professionnels, j'ai écouté d'une oreille distraite la pop froide et inexpressive de the Notes, j'ai pensé à Indochine en assistant au set des Young Michelin, j'ai rêvé devant the Radio Dept, et ai voyagé dans le temps avec les Raincoats (très bonne surprise, au demeurant).






Le lendemain, rebelote, malgré la fatigue qui commençait à se faire sentir et un bon gros rhume attrapé dans la foulée. Le dimanche soir, j'ai écouté distraitement le rock éparpillé d'Edgar Pilot, j'ai plongé dans la folk de James Blackshaw la tête la première et je me suis laissée emporter, avant d'être hypnotisée (même des oreilles) par le rock lourd et puissant de Swans. J'en suis ressortie vidée, mais heureuse.
 




Pour finir en beauté, j'ai fait le déplacement dans un froid quasi-polaire jusqu'au Café de la danse hier soir pour écouter the Tallest Man on Earth. Et seul sur scène, le petit gars a vraiment l'air grand. Il réussit à emporter la foule (le concert affichait complet) sans difficulté et à nous emmener très loin. Les demoiselles du premier rang étaient visiblement sous le charme, et pas uniquement de sa musique.



Prochaine escale musicale, si vous le voulez bien, ce sera vendredi prochain, avec Oh La La! à la Flèche d'Or, dans le cadre des Pias Nites. Et je crois que ça méritera bien un article entier.

lundi 22 novembre 2010

Soupe de tomates aux boulettes de boeuf épicées

Par un horrible dimanche soir de novembre, quand à 17h30, il fait nuit noire, qu'on n'a pas vu le soleil de la journée et qu'on doit se lever à 4h30 le lendemain, rien de tel qu'une bonne soupe pour se réconforter. Justement, j'adore ça et je teste successivement toutes les recettes possible de soupe-repas, pour qu'un ou deux bols suffisent à caler même les estomacs les plus creux.

Comme d'habitude, j'ai pris une recette basique de soupe de tomates que j'ai améliorée à ma façon.

Pour 4 personnes

Ingrédients

- 2 grosses boîtes de tomates pelées
- concentré de tomate
- 2 oignons
- 1 gousse d'ail
- Huile d'olive
- 1 cuiller à soupe de sucre
- 1 pincée de sel
- 1 bouquet garni
- 2 steaks hachés à 5 % de MG
- 1 jaune d'oeuf
- Tabasco
- Cumin
- Coriandre moulue



Hachez l'ail avec un oignon dans un fait-tout. Faites les revenir dans une cuillerée d'huile d'olive. Ajoutez deux cuillerées à soupe de concentré de tomate, et les tomates avec le jus. Saupoudrez du sucre et de sel, et ajoutez le bouquet garni. Versez de l'eau jusqu'à ce que le fait-tout soit rempli.

Faites bouillir pendant une vingtaine de minutes. 

Pendant ce temps, préparez des boulettes avec la viande, le reste d'oignon et le jaune d'œuf. Roulez les boulettes dans le cumin. Ensuite, faites-les revenir dans une poêle avec de l'huile d'olive jusqu'à ce que la viande soit cuite. Ajoutez les boulettes à la soupe.

Saupoudrez de coriandre moulue et versez quelques gouttes de Tabasco.

Servez bien chaud.

dimanche 21 novembre 2010

Rubber - Quentin Dupieux

Peu de personnes parmi vous le savent, mais je suis une grande fan de cinéma d'horreur, de films gore en tout genre, de séries Z et autres séries B. Rien ne me plaît plus, après une semaine stressante, que de regarder un tel film, en me cramponnant à mon siège comme une hystérique. C'est plus fort que moi, ça agit sur mes nerfs comme un véritable exécutoire. En outre, rien ne me plaît plus que lorsque le film en question joue avec le spectateur et manie l'humour noir. 

Je ris beaucoup, mais surtout de l'absurde et le quotidien m'amuse toujours plus qu'un spectacle comique écrit. En fait, je n'aime pas trop l'improvisation non plus, surtout dans un one-man-show, et j'ai du mal avec le stand-up, notamment parce que je ne supporte pas qu'on essaie à tout prix de me faire rire. Quand j'entends un comique lancer une vanne et attendre les éclats de rire des spectateurs, ça m'agace, je n'y peux rien. Je n'ai pas plus envie de rire dans de tels moments que s'il me tendait un panneau "RIRE" comme un vulgaire chauffeur de salle.

Pour toutes ces raisons, j'ai adoré Rubber, dernier film de Quentin Dupieux.



D'abord, le contexte annonce clairement la couleur : on est dans un désert américain, type Arizona, dans lequel on est plus susceptible de croiser une décharge sauvage qu'un autre être vivant. Évidemment, tous les classiques du genre sont réunis : la route interminable et vide, la station service glauque et presque abandonnée, avec son téléphone public qui ne fonctionne pas, et bien sûr les motels miteux des bords de route. Ah, j'oubliais, il y a aussi la traditionnelle fille en mini-short.

Maintenant que le décors est planté, il nous faut un tueur. Et c'est là que Quentin Dupieux est fort. Son tueur à lui, c'est un pneu, un simple pneu abandonné dans une décharge. A peine a-t-il pris vie qu'on le sent animé par une haine féroce contre tout ce qui l'entoure, excepté la fille en short : de la canette vide à la bouteille de bière, en passant par un pauvre lapin ou un corbeau qui n'ont commis, pour seule faute, que celle d'avoir croisé sa route. Doué de pouvoirs de psychokinésie, notre ami ne se contente bientôt plus seulement d'écraser les importuns de tout son poids, il leur fait littéralement exploser la tête...

Mais il y a mieux. Car l'épopée sanglante de notre ami Robert est suivie avidement par un groupe de spectateurs qui campent dans le désert et l'observent aux jumelles. Que font-ils là, demanderez-vous ? Apparemment, ils auraient payé leur place pour assister au spectacle, comme nous, pauvres cinéphiles qui avons dépensé plus de 10 euros pour nous retrouver dans une minuscule salle de Gaumont dans le seul but de suivre les aventures d'un pneu serial-killer.

ALERTE SPOILER (Si vous voulez voir Rubber, je vous déconseille de lire la suite, sous peine de voir l'intense suspense de ce road-movie tomber à plat) 

Tout au long du film, le réalisateur ne cesse de nous rappeler qu'il ne s'agit que de cinéma, que tout cela est fictif et qu'il ne faut surtout pas le prendre au sérieux. L'un des personnages principaux, le shérif chargé d'enquêter sur les morts suspectes, nous le prouve même explicitement lors d'une scène hilarante au cours de laquelle il demande à ses inspecteurs de lui tirer dessus et qu'il leur dit qu'il ne sent strictement rien (bien qu'il se mette à perdre des litres de ce que l'on imagine, du coup, être du faux sang).

Pourquoi le tueur est-il un pneu ? Pourquoi le shérif ne meurt-il pas en se faisant tirer dessus alors que la pauvre femme de ménage de motel finit avec le crâne déchiqueté ? Pourquoi le pneu écoute-t-il attentivement le gamin lui parler avant de faire demi-tour et de l'abandonner ? Pourquoi l'épargner alors qu'il lui balance une canette dessus ? La seule et unique réponse à cela est sans doute : No reason, et ce n'est pas le shérif qui me contredirait.

Fable poétique et contemplative, série Z, film absurde, Rubber est tout cela à la fois. Que faut-il en attendre ? Rien, surtout. N'y allez pas en espérant voir du sang, ni un film d'horreur, ni en croyant que le film vous fera mourir de rire. Mais soyez assurés de trouver en Rubber un souçon de chacun de ces ingrédients.

Scène émouvante : Le pneu est amoureux, le pneu se sent seul et moche, comparé à Roxanne Mesquida (et on le comprend). Devant un miroir, il observe successivement son profil droit, puis son profil gauche et on peut presque lire la déception sur son visage (il a un visage, puisqu'on le voit boire de l'eau).

Scène culte avant l'heure : Le shérif enlève l'un des pneus de sa voiture, l'amène devant ses inspecteurs et déclare : "Voilà à quoi ressemble notre assassin".


samedi 20 novembre 2010

Polnarévolution, 1972 - Grandeur, puis décadence

En 1972, soit 10 ans avant ma naissance, j'aurais pu aimer Michel Polnareff pour ce qu'il était, et non pour ce qu'il avait été. Malheureusement pour moi, je ne peux aujourd'hui qu'admirer une gloire passée qui n'a plus rien  de génial ni d'impressionnant. Les vestiges d'une époque, en quelque sorte (mais n'est-ce pas le cas de beaucoup de trucs que j'écoute ? En écoutant le nouveau Ray Davies, on peut se poser la question).

En 1972, Michel Polnareff est au sommet de son art, au sommet de son talent. Le jeune garçon timide et génial est en train de se transformer en mégastar mégalomane. Le tournant se joue précisément pendant cette série de concerts à l'Olympia, au mois d'octobre.

En 1993, je me suis retrouvée en possession d'une cassette audio sur laquelle ce live avait été enregistré à l'époque, par mon père. J'adorais tellement cette cassette, que je dormais presque avec (je m'endormais avec mon casque de walkman sur les oreilles). Malheureusement, quiconque me connait un peu sait que je suis d'un naturel désorganisé, voire, pour certains, carrément bordélique. A force de balader la cassette au fond de mon sac, un jour, ce qui devait arriver arriva : une miette de pain au chocolat se glissa à l'intérieur. Terrorisée à l'idée de voir disparaître ma précieuse cassette, je tentai tout, pendant plusieurs jours, pour faire sortir l'intruse, sans succès. La seule chose que je réussis à faire, ce fut retourner la bande à l'intérieur de la cassette, ce qui la rendit complètement inaudible.

Ne voyant plus d'issue au problème, j'avais fini, en désespoir de cause, par dérouler entièrement la bande de la cassette dans tout l'étage de la maison de mes parents, avec tout le soin et la minutie dont j'étais malgré tout capable. Miracle : en secouant légèrement, la miette de pain au chocolat finit par sortir. Dotée d'une patience à toute épreuve dans ce genre de situations, j'entrepris donc de rembobiner doucement la cassette avec un crayon à papier. L'opération dura un nombre d'heures effarant, tout ça pour pour une simple cassette (à l'époque déjà, la logique aurait dû me suggérer de racheter simplement cet album en CD, mais j'en étais hélas totalement dépourvue), mais s'avéra payante : elle remarcha si parfaitement que je peux encore l'écouter aujourd'hui dans mon vieil autoradio.



Malgré le son assez pourri de cet enregistrement live, on y retrouve de merveilleuses versions de quelques uns des tubes de Polnareff. Son chef-d'œuvre ultime, le Bal des Laze, y est absolument magistral avec une basse et une batterie qui lui donnent une urgence que la version originale n'a pas, l'orgue pour le côté "je chante depuis mon cachot humide" et la flûte traversière pour le côté aristocratie... La voix de Polnareff y est parfaite, posée, moins plaintive qu'à l'ordinaire, d'un calme et d'un détachement qui retranscrivent idéalement l'état d'esprit de son personnage.

La Mouche et la Maison vide, elles aussi dans des versions plus rapides, sont d'une intensité qu'on ne retrouvera plus jamais (quand je pense au live auquel j'ai assisté, j'ai toujours envie de pleurer). Polnareff a encore de l'humour vis-à-vis de lui-même, un recul qu'il n'a eu de cesse de perdre depuis. Il rit de ses ennuis avec la justice sur On ira tous au paradis en ajoutant la phrase "qu'on montre son cul ou qu'on ne le montre pas", faisant référence à la polémique suscitée par la célèbre affiche du spectacle. Il interprète d'ailleurs cette chanson avec une voix grave et sobre qu'il oubliera parfois d'utiliser par la suite, au profit d'emphases et d'envolées lyriques pas toujours bienvenues. Même Gloria et Ca n'arrive qu'aux autres perdent de leur pathos et deviennent touchantes. Sur Love me, please love me, il improvise au piano  avec une facilité et une maîtrise de virtuose. Quant à La Trompette, c'est une véritable démonstration des capacités vocales et rythmiques du chanteur.

Après cette tournée, Polnareff se laissera engloutir par ses propres démons, se fera voler son argent, s'exilera aux Etats-Unis où la Californie achèvera de l'encourager dans le mauvais goût bling bling, cèdera bien trop souvent à la facilité et composera des daubes sans nom... Resteront quelques pépites malgré tout, à sauver du carnage : Le Prince en otage, L'homme qui pleurait des larmes de verre, ou Une histoire lamentable (oui, perso, j'adore cette chanson), mais finalement, peu de choses réellement dignes d'intérêt.

Aux dernières nouvelles, le vieil homme bedonnant attendrait, à 66 ans, son premier enfant... A la limite, c'est pas plus mal, espérons que ça l'occupe suffisamment pour que jamais ne sorte son "nouvel album" tant attendu par les hordes de fans que la nostalgie rend sourds. Il a déjà suffisamment essayé de nous faire oublier à quel point il avait pu être un génie.

jeudi 18 novembre 2010

Où l'on apprend à tourner la page et à se diversifier

Oyez Oyez, bonnes gens.

L'hiver arrivant à grands pas, et avec lui les traditionnelles averses, le vent, les températures glaciales, le gris, etc., je n'ai plus envie que d'une chose ou presque : un plaid bien chaud avec une tasse de thé fumant, un bon roman (ça marche aussi avec Libération, Fluide Glacial ou Causette), un biscuit ou deux et en fond, un disque vintage déniché dans mes armoires pour me rassurer et me remonter le moral (et un chat, évidemment, mais ne comptez pas sur moi pour vous raconter trop sa vie).

Voilà mon objectif avec ce nouveau blog : j'ai envie qu'il soit un peu tout ça à la fois, qu'il vous fasse rire, vous cultive un peu (pour ceux qui ne seraient pas déjà des puits de culture), vous donne des idées de plats si vous recevez des amis, vous envoie, pourquoi pas, visiter des expos, vous expédie avec un coup de pied aux fesses dans des salles de concert, mais surtout, vous divertisse.

Car même si I Love toujours Rockn'roll, comme chacun sait, je deviens d'un snobisme sans nom et n'accepte d'accorder mon adoration qu'avec une très grande parcimonie. Résultat : plus rien sur le blog, et plus tellement de motivation pour écrire. Mes anciennes rubriques m'ont abandonnée en route et la simple vision d'iloverocknroll.over-blog.com pourri de pop-up m'empêche d'y remettre les pieds. Pire encore : alors que mon dernier article devait être rédigé en trois parties, je n'ai jamais pu trouver le courage d'écrire les deux dernières. La seule solution qui s'imposait alors à moi a donc été de créer un nouveau blog, tout neuf, tout beau, empli de 1001 choses qui s'empilent et s'entassent dans un joyeux bordel qui me ressemblera finalement bien plus que des séries d'articles très encadrés du précédent.

Puisque les présentations sont faites, je vous souhaite la bienvenue. Faites le tour de la propriété, installez-vous sur un pouf et faites comme chez vous. Je vais tâcher, cette fois, de ne pas vous laisser vous ennuyer trop longtemps.